Quand on mange trop vite.
Cet article fait partie d'une série introduite par ici.
Dans ce système, une action correctrice est appliquée à répétition, faute de changement dans les résultats, ou d'une trop lente évolution. Les effets de l'action correctrice se produisant à retardement, il arrive un point où, soit l'action correctrice, bien que correcte, est abandonnée, soit, malgré l'atteinte du résultat, le système semble être pris dans une forme d'inertie jusqu'à être déstabilisé.
Ce type de système vous évoque-t-il une situation à laquelle vous êtes confronté ?
Si oui, je vous suggère de saisir un crayon et de reprendre l’illustration en replaçant les labels génériques par ceux de la situation à laquelle vous pensez.
Un exemple de la vie de tous les jours peut-être lorsque nous mangeons. Vous avez très faim, et vous vous mettez à manger vite. Malgré la quantité ingérée en peu de temps, la faim est toujours présente, car le sentiment de satiété est un processus lent et complexe qui met 15 à 30 à minutes à se manifester (délai), alors vous mangez plus. Au bout d'un moment, la satiété vient, et vous sentez même que vous avez beaucoup trop mangé.
En entreprise, ça peut être la remontée d'un besoin de recrutement. Tant qu'il y a un besoin d'effectifs, il peut être demandé à une équipe dédiée de recruter. Toute activité de recrutement prend du temps, de l'identification des caractéristiques recherchées, au ciblage, à la rencontre et l'aboutissement potentiel du processus vers la signature du contrat. Si les initiateurs de la demande ne sont pas conscients de l'étendue de ce délai, ils peuvent continuer à demander à recruter. Arrivés au moment où les effectifs répondent au besoin, il existe encore des personnes en cours de recrutement qui finiront par augmenter les effectifs au-delà de la cible. Par ailleurs, cette cible est probablement mouvante, et avec des délais probablement différents de ceux du recrutement. La conséquence est un surcoût pour les besoins de production qui tend, entre autres, à orienter l'entreprise vers des difficultés économiques, un manque de capacité à accompagner les nouveaux venus et donc des écarts de pratiques, etc. Ce type de situation ressemble au jeu de la bière (notamment décrit dans « la cinquième discipline » de Peter Senge) dans lequel des joueurs portent les rôles de vendeur, distributeur et producteur de bière, avec des délais dans les processus.
Le problème essentiel est que le délai n'est pas pris en compte. Si personne ne l'a envisagé, l'absence de résultat immédiat devrait déclencher la question de l'existence d'un délai. Si ce délai est connu, mais que vous n'avez pas d'indicateur, tenter des mesures, finales ou intermédiaires, pour le déterminer, même approximativement. Et que vous puissiez le mesurer ou non, armez-vous de patience.
Dans le cas du repas, cela implique de ralentir, en étant conscient du délai classique avant satiété.
Dans le cas des recrutements, les initiateurs et l'équipe de recrutement doivent régulièrement se partager leurs indicateurs de besoin de recrutement et les candidats en cours de processus de recrutement. Les conditions pouvant évoluer dans les deux sens à la fois du côté des besoins, et des potentiels recrutés, la meilleure méthode est simplement de prévoir avec ce que l'on sait, et d'ajuster en prenant en compte les délais.
Si vous imaginez une solution potentielle à la situation que vous avez dessiné plus haut, tentez de la dessiner. Le système au global produit-il les résultats souhaités ? Imaginez que les effets des flèches produisent leur contraire, que se passe-t-il ?
Ce système est cité dans « la cinquième discipline » de Peter Senge, et « Thinking in systems » de Donella Meadows.
